La Suède est un pays du Nord, moderne et civilisé, avec des transports en commun, des Smartphones et peu de soleil. C’est également une monarchie. Contrairement à ses cousins anglais, la famille royale suédoise se montre plutôt discrète sur la scène internationale, cependant que, dans la plupart des foyers, des autels sont dressés à la gloire des figures tutélaires vénérées par les autochtones.
Sur la photo ci-dessous, vous distinguez à côté de la princesse héritière Victoria et de son altesse royale le prince Daniel, accessoirement professeur de fitness, les lares scandinaves, les Moumines. Originaires de Finlande, ils ont étendu leur empire jusqu’au voisin suédois, qui a aussi filouté les trolls et le saumon à la Norvège, ainsi que les rennes à la Laponie. Elle s’est également approprié le père Noël. elle est pourtant dépositaire d’un important patrimoine culturel. Qui n’a jamais entendu parler d’H&M ou Ikea ? Le cheval de Dalécarlie n’a, hélas, pas connu ce rayonnement universel. Il n’en demeure pas moins un symbole de ralliement pour le peuple suédois.
Etablie à environ 1860 kilomètres au Nord-Est du centre de l’univers connu, la majestueuse Stockholm se dresse face à la Baltie, un ensemble de petits pays anciennement russes dont personne ne sait rien. Enracinée sur un archipel, elle offre une plaisante diversité de paysages urbains et chaque île possède son identité propre.
Au centre, on trouve Gamla Stan, la vieille ville. Avec ses ruelles étroites, ses immeubles séculaires aux couleurs de l’automne et parés de moulures romantiques, c’est probablement la plus charmante des îles. Quelques-unes de ses artères sont malheureusement défigurées par d’odieux repaires à touristes, les « gift shops ». Ils renferment d’immondes T-shirts, porte-clefs, tasses et autres stylos à l’effigie de Stockholm ou de ses ambassadeurs les plus populaires (renne, cheval, Moumines, Pingu, Fifi Brindacier alias Pippi). Ces artefacts réjouiront néanmoins les membres de votre entourage, trop contents de recevoir des présents significatifs.
Au Nord de Gamla Stan, une fois passé le coin baroque italien qui s’incarne dans d’imposants palais, vous parcourrez Östermalm. C’est l’équivalent de l’Ouest de Paris : larges avenues et magasins si onéreux qu’il vous en coûte de regarder leur vitrine. Au Sud, Södermalm : l’île branchée contient, à l’Ouest, des magasins, à l’Est, un peu de calme et de beauté dans ce monde de brutes.
Et puis il y a Djurgården, l’île aux loisirs, aux enfants, aux animaux, où les Suédois de plus de vingt-cinq ans se retrouvent le dimanche. On y trouve notamment le musée Vasa, la retraite du prince Eugène et Skansen, un écomusée-zoo géant : devant des habitations, fermes et autres moulins du XVIIe siècle, des suédois en tenue d’antan vous accueilleront pour vous raconter l’existence, telle qu’on la menait avant, quand c’était mieux. Dans le même parc, vous croiserez des poules, des coqs et des paons en liberté, des lynx et des loups dans des enclos luxuriants, des veaux qui courent après des chèvres. Une petite foire vous permettra d’acheter toutes sortes de produits artisanaux et de longues tables en bois vous inciteront à vous restaurer en pleine nature.
Si vous n’avez pas le goût de ce genre d’amusement, vous pouvez prendre le bateau rouge qui vous conduira à Gröna Lund, le parc d’attraction. Si vous êtes un triste sire et que vous n’aimez pas non plus avoir la tête à l’envers, il y aura toujours l’île aux musées.
A quoi ressemblent les Suédois ? C’est la question qui brûle évidemment toutes les lèvres, tant leur réputation les précède. Ils sont grands et châtains ; elles sont grandes et blondes (le décalage fait d’ailleurs penser à un usage secret de teinture pour cheveux). Vous croiserez, bien entendu, des petits comme des bruns, mais, le plus souvent, occupés à faire le ménage ou à vendre des hot dogs. Très sportifs – le dimanche, quasiment tout le monde a revêtu sa tenue de marathon ou emporté sa crosse de hockey -, les Suédois ont bon teint. Mais c’est surtout, hommes et femmes confondus, leur élégance qui frappe. Apparemment la mode périurbaine qui habille une (trop) grande part de notre population n’a pas fait beaucoup d’émules parmi les Suédois, qui optent pour un « casual chic » qui ferait passer une Germanopratine pour une souillon.
A Stockholm, il n’existe apparemment pas d’individu n’ayant pas le temps de se coiffer, ne sachant pas s’habiller ou ayant d’autres chats à fouetter. Ajoutons qu’il n’y a pas une grande différence entre les tenues masculines et féminines. Les Suédois sont, en fait, tous plus ou moins sortis du même moule. C’en est même un peu lassant. Là-bas, la diversité des visages et des corps, les mélanges détonants, parfois vulgaires, qui caractérisent la France n’ont pas cours. Est-ce là la cause de leur air narquois lorsqu’on s’adresse à eux ? Serviables, même aimables, ils ne se départissent pourtant que rarement de leur expression goguenarde. Sommes-nous, à leurs yeux, des barbares ou certaines images d’Epinal ont-elles joué sur notre réputation ?
Adoration de trolls-hippopotames blancs et soin de son apparence mis à part, à quoi s’occupe le Suédois ? C’est difficile à dire, d’autant qu’il rentre de bonne heure au foyer, confinant ainsi la plupart de ses activités au secret domestique. On sait néanmoins qu’il aime à se déguiser, pêcher (la nuit, en ville) et danser. Vers 20 heures, il n’y aura déjà plus grand monde ni dans les rues ni dans le métro. Vous aurez alors du mal à trouver un restaurant qui serve encore.
A ce stade, il convient d’aborder un point fondamental du voyage en Suède : il n’est pas fait pour toutes les bourses. Parce qu’il s’agit d’un pays riche – la description des habitants vous l’aura, en principe, fait comprendre, il s’agit aussi d’un pays cher. Et quand j’écris « cher », lisez-moi bien : pour deux plats et deux verres de vin dans un restaurant aux prix honnêtes, vous en aurez pour environs 800 couronnes, soit près de 90 euros.
En Suède, vous ne croiserez pas de bistrots à chaque coin de rue et vous ne risquez pas de faire bonne chère pour une quinzaine d’euros. En Suède, sortir le soir, c’est vraiment « sortir le soir », un acte sérieux, solennel, qui se déroule dans un cadre tamisé et raffiné, où vous n’oserez pas dégainer votre appareil photo pour informer vos amis de ce qu’on y mange. Les produits sont de qualité et les portions très généreuses, ce qui vous consolera si vous tentez l’aventure. A noter que les menus du midi sont bien moins chers.
A priori, votre destination quotidienne sera donc le supermarché, où vous trouverez de quoi vous sustenter pour des prix raisonnables ou à peu près. Vous vous rendrez compte bien assez tôt de la facilité avec laquelle on peut changer d’échelle de valeurs. Peut-être vous laisserez-vous tenter par les petites originalités de la gastronomie suédoise, tels que ces tubes de crème de Kaviar, de bacon ou de roquefort. Lorsque vous souhaiterez faire bombance, vous vous rendrez au Saluhall d’Östermalm, un marché couvert, dont les hauts murs briqués dissimulent bien des merveilles. Vous dégusterez alors du saumon fumé charnu, du hareng cuit fumé étonnant, peut-être même de petites tartines sophistiquées. Mais, en bon Gaulois que vous êtes, vous irez surtout au Burger King.
Une sélection musicale Suédoise par Sodwee
Lykke Li – I Follow Rivers (The Magician Remix)
Robyn – None Of Dem (Feat. Röyksopp)